La mort d'un "Ange blanc "

                                                                Jean pierre MALAFOSSE

 

 

 

 

 

Me faire ça à moi! Ils n'ont aucun respect ces soit disant royaux!

Je vous livre mon anecdote de l’année : la mort d’un ange blanc. J’en suis
encore tout retourné! Mais quelle observation d'enfer.

Je suis allé surveiller une aire d’aigle royal vers Villefort et la femelle
couvait tranquillement, observant tout autour d’elle le trafic de divers
animaux et de son mâle qui est passé dans le secteur entre temps. Cette
nouvelle aire très confortable à été construite l’an dernier.
Soudain, sur la crête au dessus d’elle, arrive un mâle de circaète qui
cherchait d’aventure quelques serpents durant cette première belle journée
de printemps de l’année. Tout des suite, la reine des oiseaux remarque cet
intrus qui arpente le haut de son domaine et ne le lâche pas d’une semelle
de son regard affuté, au travers des branches du gros douglas qui abrite son
aire. Le circaète scrute avec attention ce petit vallon aride et propice aux
reptiles indolents. Il le chasse sans doute depuis des années et trouve
souvent une proie nichée au cœur des rocailles et des bruyères. Pas de
problème, au bout de quelques minutes il repère ce qu’il est venu chercher pour sa
belle. Il se laisse tomber sur sa proie et fait mouche. Il s’occupe de sa
proie sans ce douter que cette année un locataire est venu investir les
lieux. Pourquoi regarder derrière?
Je viens de suivre le circaète avec les jumelles et je surveille la femelle d’aigle
dans la longue-vue. Elle suit du regard la descente du Jean le Blanc et le
perfore de ses yeux acérés lorsqu’il touche terre. Je pense alors que le
circaète devrait être prudent. Lorsque la femelle se lève sur son aire et juge
la situation je viens à craindre le pire ; enfin lorsqu’elle s’élance hors
du nid je n’ai plus aucun doute : s’en est fini du circaète. Elle progresse
très intelligemment en rasant la partie haute du vallon, contourne un rocher
à l’ abri du regard de sa proie puis fonce directement sur elle sans le
moindre coup d’aile. Elle harponne le circaète de plein fouet avec ses deux
serres et le plaque à terre. Il se défend à peine, tétanisé par le choc et
la puissance de son agresseur. La tête sous le corps de l’aigle et les ailes
à demi écartées il se laisse plumer vivant en bougeant quelques fois les
ailes. Ensuite elle le déplace un peu, le circaète pose sa tête en arrière
sur son propre dos, ses deux yeux jaunes semblent implorer l’aigle qui l’
observe d’un regard profond. Ce face à face pathétique dure quelques
interminables secondes, puis l’aigle s’envole et regagne son aire tandis que
la tête du circaète tombe en avant...Il vient sans doute de mourir. L’ironie
c’est que l’aigle n’a pas mangé un bout du circaète. Le crime est gratuit et
peut on appeler ça une prédation?

A bientôt pour des nouvelles plus rigolotes

JP