DECLINE OF THE GOLDEN EAGLE (AQUILA CHRYSAETOS) IN ETHIOPIA

 

MICHEL CLOUET AND CLAUDE BARRAU

 

Journal of Raptor Research Jun 2015, Vol. 49, No. 2: 222-226.

 

 

 

DÉCLIN DE L’AIGLE ROYAL EN ÉTHIOPIE

 

Les  montagnes d’Éthiopie où l’étage afro-alpin est le plus étendu du continent africain sont remarquables par leur flore et leur faune endémiques et la présence de rares espèces paléarctiques. Dans le Parc National des Monts Balé à l’est de la grande faille du Rift est-africain existe une petite population d’aigles royaux, la seule connue au sud du Sahara. Découverte et suivie dans les années 1990, elle occupe principalement la vallée de la rivière Web, entre 3000 et 4000 mètres d’altitude, un habitat qu’elle partage avec le loup d’Éthiopie, canidé le plus rare du monde et emblématique de cet étage afro-alpin éthiopien. C’est la riche et dense communauté de rongeurs (dont la biomasse peut atteindre l’équivalent de celle des grands ongulés dans les savanes est-africaines) et la présence d’un lièvre endémique qui ont permis la survivance de cette population relictuelle d’aigles royaux, témoin des mouvements de la faune paléarctique vers l’Afrique lors des épisodes glaciaires pléistocènes. Mais le nombre des territoires occupés par l’aigle royal  a fortement décliné : des sept sites suivis dans les années 1990, il n’en restait que trois occupés lors de notre dernier séjour en février et mars 2014.

 

Deux causes non exclusives peuvent expliquer ce déclin : une altération de l’habitat afro-alpin et les contraintes démographiques d’une petite population isolée.

 

Depuis trois décennies, le Parc National des Monts Balé est  soumis à une pression humaine qui ne cesse d’augmenter et qui affecte toutes les composantes de son écosystème si particulier. L’intensification de la pénétration humaine dans l’étage afro-alpin  (installation de nouveaux villages, augmentation du nombres des troupeaux domestiques et de chiens…) s’est accompagnée d’effets négatifs sur le milieu en général et sur l’habitat de l’aigle royal en particulier : surpâturage, brulis, dérangements, réduction des territoires de chasse et des proies potentielles. 

 

D’autre part cette petite population est dans une situation unique d’isolement (depuis 200 000-300 000 ans  d’après l’analyse génétique, Wink et al. 2004) et d’éloignement des sources potentielles de colonisation. Très peu productive, concurrencée par les aigles de Verreaux, elle apparaît donc hautement vulnérable et, comme en atteste le déclin observé, probablement au bord de l’extinction.

 

Même si elle vient très tard, la préservation effective de l’habitat afro-alpin à l’aide d’une réglementation adaptée et respectée, est le seul moyen de retarder cette échéance et d’aider à la sauvegarde d’un écosystème unique.